CSJ-29.05.1997

Thème(s)
Actions récusoires
Domaine(s)
Immunités
Mot(s) clef(s)
Agression dans un bus transportant des élèves  | Recours contre élève  | Accident provoqué intentionnellement  | Recevabilité  | Conditions  | Minorité

Référence

  • CSJ-29.05.1997
  • numéro 18643 du rôle
  • Aff. N. c/ H.
  • U199151889

Base légale

  • Art0115-CSS
  • Art0117-CSS

Sommaire

Il y a lieu de confirmer le jugement en ce qu'il a retenu que H. a agi intentionnellement, que ses coups ont été à l'origine des blessures subies par l'intimé et que la demande en dommages et intérêts est fondée en principe pour les montants qui ne sont pas couverts par l'Association d'Assurance contre les Accidents.

Corps

Arrêt civil:
N. et consorts
c/H.
du vingt-neuf mai mil neuf cent quatre-vingt-dix-sept

Maître Félix LAPLUME

Nous JEAN,

par la grâce de Dieu,

Grand-Duc de Luxembourg,

Duc de Nassau,
etc., etc., etc;

Faisons savoir :

que la Cour d'appel du Grand-Duché de Luxembourg, troisième chambre, siégeant en matière civile, a rendu en son audience publique du vingt-neuf mai mil neuf cent quatre-vingt-dix-sept l'arrêt qui suit dans la cause inscrite sous le numéro 18643 du rôle

Les qualités ont été notifiées par Maître Félix LAPLUME, avocat-avoué des parties intimées, N. et consorts

LA COUR D'APPEL :

Par acte d'huissier du 27 septembre 1995 H. a régulièrement relevé appel d'un jugement rendu contradictoirement entre parties par le tribunal d'arrondissement de Diekirch le 11 juillet 1995.

Le tribunal, au dispositif du jugement entrepris, a dit fondées en principe les actions en indemnisation exercées par N., N. et M. dans la mesure où elles tendent au paiement du montant des dommages qui ne sont pas couverts par l'Association d'Assurance contre les Accidents et a nommé un collège d'experts pour déterminer le préjudice matériel et moral subi par N. ainsi que le préjudice moral subi par ricochet par les époux N.-M., compte tenu du montant couvert par l'Association d'Assurance contre les Accidents, respectivement du recours exercé par l'Association d'Assurance contre les Accidents.

N. avait reçu le 7 juin 1991 lors d'un transport scolaire un coup de poing au visage par le mineur d'âge H. qui a été pour lui la cause d'une commotion cérébrale et d'une fracture compliquée de l'orbite de l'oeil gauche qui a nécessité un transfert à la clinique universitaire de Hombourg/Saar.

L'appelant reprend en instance d'appel le moyen d'irrecevabilité tiré de l'article 115 du code des assurances sociales qu'il avait déjà soulevé en première instance.

L'article 115 du code des assurances sociales fait défense à la personne assurée auprès de l'Assurance-Accident d'agir en dommages et intérêts contre toute autre personne membre du même organisme d'assurance à moins qu'un jugement pénal n'ait déclaré le défendeur coupable d'avoir intentionnellement provoqué l'accident.

L'appelant critique le jugement pour avoir écarté cette fin de non recevoir et pour avoir fait une application erronée de l'article 117 du même code. L'article 117 permet à la victime d'actionner la personne responsable de ses dommages en dehors d'une condamnation pénale au cas où un motif inhérent à la personne du responsable a empêché cette condamnation à intervenir.

Il est constant en cause que le Parquet n'a pas intenté une action pénale contre le mineur H., de sorte qu'aucun jugement pénal n'est intervenu à son égard.

Le tribunal, pour dire la demande en dédommagement des intimés fondée en principe, a retenu qu'eu égard au fait qu'en raison de la législation sur la protection de la jeunesse devant le tribunal de jeunesse, la victime ne pouvait pas mettre incidemment en mouvement l'action publique devant le tribunal compétent, il y avait lieu d'admettre qu'un motif inhérent à la personne de H. a empêché l'intervention d'un jugement au pénal.

L'appelant critique ce raisonnement en disant qu'aucun motif inhérent à sa personne n'a empêché l'intervention d'un jugement au pénal, mais qu'un tel jugement n'est pas intervenu parce que le Ministère Public n'a pas intenté une action contre lui et que la victime n'a pas été en mesure de faire personnellement une citation directe avec constitution de partie civile. Il affirme que ces circonstances sont étrangères à sa personne.
Cette argumentation ne peut pas être admise.
Le motif pour lequel un jugement pénal n'a pu intervenir c'est précisément la minorité de l'auteur des coups. Si l'auteur des coups n'avait pas été mineur, la victime aurait pu mettre en oeuvre l'action pénale par une citation directe devant le tribunal compétent.
Il s'agit dès lors d'un motif inhérent à la personne responsable des violences qui a empêché la condamnation au pénal.
Les juges de première instance ont fait une juste application de l'article 117 du code des assurances sociales et il y a lieu de confirmer le jugement sur ce point.
L'appelant fait valoir pour le cas où la Cour devrait confirmer le premier jugement sur la recevabilité de l'action en dommages et intérêts des intimés, qu'il faudra tenir compte du fait que les coups et blessures infligés à la victime ont été directement provoqués par celle-ci.

Il demande à voir dire que sa responsabilité n'est pas engagée dans le dommage survenu à la victime, sinon en ordre subsidiaire à voir dire que la majeure part de responsabilité reste à charge de N.

Il n'est pas contesté que la victime avait taquiné H. et que pour mettre fin à ces taquineries ce dernier a donné à N. un violent coup de poing au visage qui a entraîné pour lui les blessures dont il fait état.

L'appelant n'a cependant pas établi ni par le procès-verbal, ni par un autre renseignement, que la provocation avait été telle qu'il a dû recourir à la force pour se défendre contre une véritable agression. Dans ces conditions un partage de responsabilité est exclu.

Il y a dès lors lieu de confirmer le jugement en ce qu'il a retenu que H. a agi intentionnellement, que ses coups ont été à l'origine des blessures subies par l'intimé et que la demande en dommages et intérêts est fondée en principe pour les montants qui ne sont pas couverts par l'Association d'Assurance contre les Accidents.

La demande des intimés sur base de l'article 131-1 du code de procédure civile est fondée, les intimés ayant été obligés de se faire assister par un avocat. La Cour fixe le montant dû à cet égard à 25.000.- francs.

L'Association d'Assurance contre les Accidents, qui a été régulièrement assignée, n'a pas comparu.

Il échet de statuer à son égard par défaut faute de comparaître et de déclarer l'arrêt à intervenir commun à son égard.

Par acte d'huissier du 17 avril 1997 l'intimé N. a notifié à l'appelant et à l'Association d'Assurance contre les Accidents qu'il a changé de nom pour s'appeler D.; il y a lieu de lui en donner acte.

Par ces motifs:

la Cour d'appel, troisième chambre, siégeant en matière civile, statuant par défaut faute de comparaître à l'égard de l'Association d'Assurance contre les Accidents et contradictoirement à l'égard des autres parties, le représentant du Ministère Public entendu en ses conclusions,

donne acte à D. de son changement de nom;

reçoit l'appel;

dit qu'il n'est pas fondé;

confirme le jugement du 11 juillet 1995;

déclare l'arrêt commun à l'Association d'Assurance contre les Accidents;

condamne H. à payer aux intimés 25.000.- (vingt-cinq mille) francs sur base de l'article 131-1 du code de procédure civile;

condamne l'appelant H. aux frais et dépens de l'instance d'appel avec distraction au profit de Maître Félix LAPLUME, avocat concluant qui la demande,
affirmant en avoir fait l'avance.

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