GRAND-DUCHE DU LUXEMBOURG
Conseil Arbitral de la Sécurité Sociale
Audience publique du vingt-et-un avril deux mille quinze
Composition: |
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M. Paul Capésius, | président du siège |
M. Roger Duhr, | assesseur-employeur |
M. Roberto Scolati, | assesseur-assuré |
ces deux derniers dûment assermentés, | |
Mme Carole Dorotea-Jemming, | secrétaire |
Entre:
H., né le ***, demeurant à *** ;
demandeur,
comparant par Monsieur F., secrétaire syndical, demeurant à Dudelange, mandataire du demandeur suivant procuration spéciale sous seing privé en date du 31 mars 2015 ;
Et:
l’Association d’assurance accident, dont le siège est à Luxembourg, représentée par le président de son comité-directeur, Monsieur Claude Seywert, demeurant à Luxembourg ;
défenderesse,
comparant par Monsieur F., inspecteur principal Ier en rang, Luxembourg, mandataire suivant procuration écrite ;
Par requête déposée au siège du Conseil arbitral de la sécurité sociale en date du 2 juillet 2014, le demandeur forma recours contre une décision du comité-directeur de l’Association d’assurance accident du 22 mai 2014.
Par lettres recommandées à la poste en date du 26 janvier 2015, les parties furent convoquées pour l’audience publique du 31 mars 2015, à laquelle le requérant comparut par Monsieur F., préqualifié.
La partie défenderesse comparut par son mandataire Monsieur F., préqualifié.
Le président du siège ouvrit les débats par un exposé de l’affaire.
Ensuite, les parties présentèrent leurs observations.
La partie demanderesse se rapporta à prudence de justice.
La partie défenderesse conclut à la confirmation de la décision attaquée.
Après prise en délibéré de l’affaire, le Conseil arbitral de la sécurité sociale rendit à l’audience publique de ce jour, à laquelle le prononcé avait été fixé, le jugement qui suit :
Vu le recours formé par l’assuré H. contre une décision du comité-directeur de l’Association d’assurance accident du 22 mai 2014 ayant, par confirmation de la décision présidentielle du 21 novembre 2013, rejeté sa demande présentée le 11 novembre 2013 en attribution d’une rente du chef d’un accident du travail dont il fut victime le 21 avril 2010, lequel accident a occasionné des douleurs lombaires associées à des douleurs des membres inférieurs neuropathiques ;
Attendu que le recours est recevable pour avoir été présenté dans les formes et délai prévus par la loi ;
Attendu que la demande tendant à l’obtention de prestations du chef de l’accident en question a été rejetée au motif qu’elle n’a pas été présentée dans le délai triennal prévu par la loi et que suivant avis du médecin-conseil du Contrôle médical de la sécurité sociale du 20 novembre 2013 les conditions d’exception prévues à l’article 149, alinéa 2 du Code de la sécurité sociale ne sont pas remplies ;
Attendu que l’ancien article 149, alinéa 1er et 2 du Code de la sécurité sociale, lequel article reste applicable à l’accident en cause, est conçu comme suit :
« Les rentes sont accordées sur demande à présenter par les victimes d’accidents ou leurs ayants droits sous peine de déchéance dans le délai de trois ans à dater de l’accident ou du jour du décès de la victime.
La demande en obtention d’une rente n’est recevable après l’expiration de ce délai que s’il est prouvé que les conséquences de l’accident, au point de vue de la capacité de travail du blessé, n’ont pu être constatées qu’ultérieurement ou que l’intéressé s’est trouvé, en suite de circonstances indépendantes de sa volonté, dans l’impossibilité de formuler sa demande. Dans ce cas la réclamation doit être présentée endéans les trois ans de la constatation des suites de l’accident ou de la cessation de l’impossibilité d’agir. » ;
Attendu que la demande de rente est parvenue à l’Association d’assurance accident le 11 novembre 2013, donc hors du délai de trois ans après l’accident ;
Attendu que la partie demanderesse conclut à la réformation de la décision entreprise et à l’octroi d’une rente accident ;
Attendu que la partie défenderesse conclut à la confirmation de la décision entreprise en faisant observer que la demande de rente est parvenue à l’Association d’assurance hors du délai de 3 ans après l’accident et que selon l’avis du médecin-conseil du Contrôle médical de la sécurité sociale aucune des conditions d’exception prévues n’est remplie ;
Attendu que le requérant n’est pas en mesure de prouver qu’il a présenté une demande de rente en indemnisation d’une incapacité de travail partielle permanente en date du 20 février 2013, de sorte que son affirmation d’avoir introduit une demande de rente à cette date reste en l’état de simple allégation ;
Attendu que dans le souci d’indemniser le plus vite possible les assurés victimes d’un accident du travail et d’éliminer au maximum les problèmes concernant l’imputabilité de certaines conséquences à un accident du travail, le législateur a imposé aux victimes l’obligation de réagir rapidement et de présenter leur réclamation dans un délai de trois ans à dater de l’accident, que dans certaines situations exceptionnelles, qui sont à interpréter limitativement, il est permis aux assurés de faire leurs réclamations après le susdit délai et que tel est le cas s’il est établi que les conséquences d’un accident, au point de vue de la capacité de travail du blessé, n’ont pu être constatées qu’ultérieurement (cf. : arrêt du Conseil supérieur des assurances sociales du 7.12.2009, n° 2009/0158) ;
Attendu qu’en considérant que les suites de l’accident nécessitaient des traitements médicaux réguliers dès la date de l’accident, il y a lieu de retenir que les conséquences immédiates de l’accident n’ont pas pu passer inaperçues et que les suites de l’accident n’étaient pas inconnues et que le requérant devait nécessairement se rendre compte, à partir de la date de l’accident, tant de l’existence d’une incapacité de travail permanente, quel qu’en soit le taux, que de la relation causale entre celle-ci et l’accident en question ;
Attendu que les douleurs dont l’assuré se plaint et dont il prétend qu’elles sont une conséquence de son accident se sont manifestées et ont déjà pu être constatées dès la survenance de l’accident du 21 avril 2010 ;
Attendu que l’assuré ne s’est pas trouvé dans la situation où les conséquences de l’accident, au point de vue de la capacité de travail du blessé, n’ont pu être constatées qu’ultérieurement, après l’expiration du délai de 3 ans et que l’intéressé, à l’égard duquel une décision de reclassement externe a été prise en janvier 2013 par la Commission mixte de reclassement, ne s’est pas non plus trouvé, en suite de circonstances indépendantes de sa volonté, dans l’impossibilité de formuler sa demande, alors qu’il n’était pas atteint d’impossibilité physique résultant d’une maladie grave ou d’un accident mettant l’intéressé hors d’état de pourvoir à ses intérêts (cf. : arrêt du Conseil supérieur des assurances sociales du 28 juin 2000, affaire B.) ;
Attendu que l’Association d’assurance accident n’est pas légalement obligée d’informer l’assuré qu’il doit présenter la demande de rente dans le délai de trois ans à dater de l’accident ;
Attendu que la simple ignorance des dispositions légales obligeant l’assuré de présenter une demande de rente dans le délai triennal prévu ne peut empêcher le cours d’une prescription extinctive et, par-là, suppléer à la carence d’une partie de formuler la réclamation par écrit, alors que le but des dispositions légales de l’article 149 du Code est de garantir la sécurité juridique et qu’elles revêtent un caractère d’ordre public ;
Attendu qu’il appert des développements qui précèdent que le requérant n’a pas prouvé remplir l’une des conditions d’exception permettant d’être relevé de la déchéance encourue par l’écoulement d’un laps de temps supérieur à trois ans à compter de l’accident et que la demande en indemnisation est irrecevable au vœu de l’article 149 du Code de la sécurité sociale ;
Attendu qu’en considérant que les douleurs dont l’assuré s’est plaint et les conséquences de l’accident au point de vue de la capacité de travail de l’assuré ont pu être et ont été constatées déjà immédiatement après l’accident, le Conseil arbitral estime qu’il est superflu de vouloir recourir à une expertise médicale ;
Par ces motifs,
le Conseil arbitral de la sécurité sociale, statuant contradictoirement et en premier ressort,
déclare le recours recevable mais non fondé et confirme la décision entreprise.
La lecture du présent jugement a été faite à l’audience publique du 21 avril 2015 en la salle d’audience du Conseil arbitral de la sécurité sociale à Luxembourg par Monsieur le président du siège Paul Capésius, en présence de Madame Carole Dorotea-Jemming, secrétaire.