CSSS-09.12.1998

Thème(s)
Prestations
Domaine(s)
Prescription
Mot(s) clef(s)
Demande de rente  | Délai triennal  | Conditions d'exception  | Rente  | Point de départ  | Rétroactivité  | Limitation aux 3 ans avant la date de réclammation

Référence

  • CSSS-09.12.1998
  • No du reg.: 678/98
  • No 224/98
  • AAI c/ S.
  • U198514773

Base légale

  • Art0097-al05-CSS
  • Art0149-CSS

Sommaire

Le point de départ des indemnités revenant à l'assuré victime d'une maladie ou d'un accident professionnel est fixé par l'article 97 alinéa 5 du CAS. Il y est dit que la rente court à partir de la cessation de l'indemnité pécuniaire ou, à défaut de celle - ci, à partir du premier jour de l'incapacité de travail partielle. Cette disposition doit toutefois être mise en rapport avec celles contenues à l'article 149 du même code où il est dit d'une façon générale que toute personne qui prétend avoir droit à une indemnité non déterminée d'office par les organes de l'assurance accidents, doit, sous peine de déchéance, présenter sa réclamation dans un délai de trois ans à dater de l'accident. Ce délai de forclusion vaut également dans l'hypothèse, donnée en l'espèce, où les conséquences de l'accident n'ont pu être constatées qu'ultérieurement. Dans ce cas, la réclamation doit être faite endéans les trois ans de la constatation des suites de l'accident.
En application de ces dispositions, l'assuré ne peut prétendre à des indemnités remontant dans le temps au-delà des 3 ans avant la date de réclamation.

Corps

GRAND - DUCHE DU LUXEMBOURG

No du reg.: G 78/98
No: 224/98

AUDIENCE PUBLIQUE DU CONSEIL SUPERIEUR
DES ASSURANCES SOCIALES

du neuf décembre 1900 quatre - vingt - dix - huit à LUXEMBOURG

Composition:

 
M. Georges Santer, 1er conseiller à la Cour d'appel, président ff
M. Julien Lucas, 1er conseiller à la Cour d'appel, assesseur-magistrat
Mme. Joséane Schroeder, conseiller à la Cour d'appel, assesseur-magistrat
M. Alphonse Kugeler, chef de serv. fisc. Arbed, Kehlen, assesseur- employeur
M. Servais Antony, ouvrier - chauffeur, Reimberg, assesseur - salarié
M. Richard Trausch, secrétaire

ENTRE:

l'Association d'assurance contre les accidents, section industrielle, dont le siège est à Luxembourg, représentée par le président de, son comité - directeur, monsieur Paul Hansen, docteur en droit, demeurant à Luxembourg,
appelante,
comparant par monsieur Georges Kohn, attaché de direction 1er en rang, demeurant à Luxembourg;

ET:

S. , né le ..., demeurant à ...,

intimé,

assisté de maître Nicolas Decker, avocat - avoué, demeurant à Luxembourg.

Par requête déposée au secrétariat du Conseil supérieur des assurances sociales le 15 juin 1998, l'Association d'assurance contre les accidents, section industrielle, a relevé appel d'un jugement rendu par le Conseil arbitral des assurances sociales le 29 avril 1998 dans la cause pendante entre elle et S. et dont le dispositif est conçu comme suit: Par ces motifs, le Conseil arbitral, statuant contradictoirement et en premier ressort, reçoit le recours en la forme; réformant partiellement, dit que le requérant a droit à une rente qui court à partir de la cessation de l'indemnité pécuniaire ou, à défaut de celle - ci, à partir du premier jour de l'incapacité de travail partielle; renvoie l'affaire devant la commission des rentes, pour fixer le début et le taux de rente à allouer au requérant jusqu'au 30 juin l995.

Les parties furent convoquées pour l'audience publique du 25 novembre 1998, à laquelle le rapporteur désigné, monsieur Julien Lucas, fit l'exposé de l'affaire.

Monsieur Georges Kohn, pour l'appelante, conclut en ordre principal à la réformation du jugement du Conseil arbitral du 29 avril 1998 et au rétablissement de la décision de la commission des rentes du 22 septembre 1997; en ordre subsidiaire, il se déclara d'accord avec l'institution d'une expertise médicale.

Maître Nicolas Decker, pour l'intimé, conclut en ordre principal à la confirmation du jugement du Conseil arbitral du 29 avril 1998; en ordre subsidiaire, il conclut à l'institution d'une expertise médicale pour fixer le début du payement d'une rente.

Après prise en délibéré de l'affaire le Conseil supérieur rendit à l'audience publique de ce jour, à laquelle le prononcé avait été fixé, l'arrêt qui suit:

S. fut blessé lors d'un accident de travail du 30 octobre 1985. Ce n'est que le 24 juillet 1995 qu'il a sollicité par l'intermédiaire de son employeur une rente pour incapacité de travail. Par jugement du 23 décembre 1996, le Conseil arbitral a dit que l'Association d'assurance contre les accidents, section industrielle, était tenue d'admettre la demande du requérant en obtention d'une rente et il a renvoyé l'affaire devant la commission des rentes pour fixation du taux de la rente.

Suite à une expertise faite par le docteur Jules Molitor, qui a fixé le taux d'incapacité de travail du requérant à 35%, l'assurance accidents alloua à l'intéressé une rente transitoire de 35% à partir du 1er juillet 1995.

S. accepta le taux de la rente, mais non son point de départ.

Affirmant que sa maladie, constatée médicalement sur le tard, existe depuis le traumatisme du 30 octobre 1985 et se basant sur les dispositions de l'article 97 alinéa 5 du Code des assurances sociales, il sollicita l'octroi d'une rente à partir du 30 octobre 1985 sinon à partir de la 14e semaine après son accident. L'assurance accidents invoqua les dispositions de l'article 149 alinéas 3 et 4 du prédit code pour fixer le point de départ de la rente au jour de la présentation de la demande.

Par jugement du 29 avril 1998, le Conseil arbitral a reçu en la forme le recours formé par S. contre la décision de la commission des rentes du 22 septembre 1997 et l'a dit partiellement fondé. Réformant partiellement la décision attaquée,, il a dit que le requérant a droit à une rente qui court à partir de la cessation de l'indemnité pécuniaire ou, à défaut de celle - ci, à partir du premier jour de l'incapacité de travail partielle. La juridiction inférieure a renvoyé l'affaire devant la commission des rentes pour fixer le début et le taux de la rente à allouer au requérant jusqu'au 30 juin 1995.

Par requête du 15 juin 1998, l'Association d'assurance contre les accidents, section industrielle, a régulièrement relevé appel de ce jugement. Elle fait valoir à l'appui de son recours qu'on ne saurait admettre l'existence d'une maladie invalidante dans le chef du requérant depuis 1985 sans violer du même coup les dispositions de l'article 149 du CAS, qui exige, sous peine de déchéance, la présentation d'une réclamation dans un délai de trois ans à dater de l'accident ou de la constatation des suites de l'accident. Elle ajoute qu'en l'absence d'éléments objectifs au dossier, on ne saurait fixer le début de la rente à allouer au requérant qu'au jour du dépôt de sa demande. Elle conclut à la réformation du jugement entrepris et demande le rétablissement de la décision de la commission des rentes du 22 septembre 1997. Elle se déclare en ordre subsidiaire d'accord avec l'institution d'une expertise aux fins de fixation du point de départ de la rente.

Mettant l'accent sur le fait que le principe de la rente est acquis, l'intimé fait exposer que l'article 149 du CAS n'entre plus en ligne de compte pour la fixation du point de départ de sa rente. Se basant sur le seul article 97 du prédit code et affirmant que sa maladie existe depuis l'accident du 30 octobre 1985, il conclut à la confirmation du jugement attaqué, sinon à l'institution d'une expertise aux mêmes fins que ci - dessus indiquées.

Il échet de relever qu'il y a accord des parties au litige sur le taux de la rente revenant à S.. C'est dès lors à tort que la juridiction inférieure a renvoyé le dossier à la commission des rentes pour la fixation de ce taux. Leur seul désaccord a trait au début de la rente. Le point de départ des indemnités revenant à l'assuré victime d'une maladie ou d'un accident professionnels est fixé par l'article 97 alinéa 5 du CAS. Il y est dit que la rente court à partir de la cessation de l'indemnité pécuniaire ou, à défaut de celle - ci, à partir du premier jour de l'incapacité de travail partielle. Cette disposition doit toutefois être mise en rapport avec celles contenues à l'article 149 du même code où il est dit d'une façon générale que toute personne qui prétend avoir droit à une indemnité non déterminée d'office par les organes de l'assurance accidents, doit, sous peine de déchéance, présenter sa réclamation dans un délai de trois ans à dater de l'accident. Ce délai de forclusion vaut également dans l'hypothèse, donnée en l'espèce, où les conséquences de l'accident n'ont pu être constatées qu'ultérieurement. Dans ce cas, la réclamation doit être faite endéans les trois ans de la constatation des suites de l'accident.

Il est acquis en cause que S. a présenté sa réclamation le 24 juillet 1995. Il ne saurait donc prétendre, en application des dispositions légales précitées, à des indemnités remontant dans le temps au - delà du 24 juillet 1992. Pour ce qui est de la fixation du premier jour de l'incapacité de travail partielle du requérant, le Conseil supérieur constate que parmi les nombreux certificats médicaux versés en cause, aucun ne remonte au - delà du 7 juillet 1995. A cela s'ajoute qu'aucune de ces pièces ne fait état d'une maladie ayant entraîné pour le requérant une incapacité de travailler.

Dans son rapport du 14 mai 1996, le docteur Hastert expose certes dans le chapitre « rappel des faits » qu'environ 6 mois après l'accident, des phénomènes dépressifs se sont installés, qui ont entraîné plusieurs arrêts de travail d'une durée de quelques mois. Il échet de relever qu'il s'agit - là de renseignements donnés au médecin par l'intimé, non vérifiés par l'homme de l'art. D'autre part, les faits en question, fussent - ils établis, ne sauraient être pris en considération pour se situer en dehors de la période susmentionnée allant du 24 juillet 1992 au jour de la demande de S..

Dans le rapport du docteur Molitor du 10 mai 1997, on lit que l'intimé a consulté au courant des dix dernières années de nombreux médecins pour troubles somatiques s'accompagnant d'une forte composante psychique. Il n'est affirmé nulle part que ces troubles aient entraîné une incapacité de travailler dans le chef du requérant. L'expert relève seulement qu'une rechute des troubles psychologiques s'est déclarée lors de l'évasion de prison de son agresseur et que l'intimé a dû arrêter le travail.

Il n'est pas précisé quand cet arrêt de travail s'est produit ni quelle fut sa durée.

Il est un fait que l'auteur de l'agression de S. s'est évadé le 29 mai 1995, donc peu de temps avant la présentation de la demande de la victime. Faute d'éléments objectifs au dossier établissant l'existence d'une maladie invalidante avant le 1er juillet 1995, il échet de dire que l'intimé n'a pas droit à une rente débutant avant cette date. Il n'y a pas lieu de recourir à l'institution d'une expertise supplémentaire, pareille mesure n'étant pas de nature à donner des résultats concluants treize ans après le traumatisme de S. et trois ans après sa demande en obtention d'une rente.

Il suit des développements qui précèdent que l'appel est fondé et que le jugement entrepris est à réformer.

Par ces motifs,

le Conseil supérieur des assurances sociales,

statuant sur le rapport oral de l'assesseur - magistrat délégué et les conclusions contradictoires des parties à l'audience,

reçoit l'appel en la forme,

le dit fondé,

réformant,

dit que S. n'a droit du chef de l'accident du 30 octobre 1985 à des prestations qu'à partir du 1er juillet 1995

La lecture du présent arrêt a été faite à l'audience publique du 9 décembre 1998 par le Président du siège Monsieur Georges Santer, en présence de Monsieur Richard Trausch, secrétaire.

Le Président ff
signé: Santer

Le secrétaire,
signé: Trausch

 

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