CSSS-26.11.1997

Thème(s)
Accident de trajet
Domaine(s)
Notion d'accident
Mot(s) clef(s)
Agression  | Absence de témoins  | Plainte  | Matérialité de l'accident  | Preuve à charge de la victime  | Offre de preuve par témoins

Référence

  • CSSS-26.11.1997
  • No du reg.: G 81/97 /No: 146/97
  • B.c/ AAI
  • U199524730

Base légale

  • CAS-Art0092-CSS

Sommaire

La réalité d'une agression par des inconnus sur le chemin de retour du travail, avec vol du sac à main contenant entre autres les recettes du jour, en l'absence de témoins, doit être prouvée par la victime autrement que par une offre de preuve tendant à établir la non-réception d'instructions spéciales de dépôt des recettes du jour dans un trésor de nuit.

Corps

GRAND-DUCHE DU LUXEMBOURG

No du reg.: G 81/97 No: 146/97

AUDIENCE PUBLIQUE DU CONSEIL SUPERIEUR DES ASSURANCES SOCIALES

du vingt-six novembre 1900 quatre-vingt-dix-sept à LUXEMBOURG

 

Composition:

 

M. Georges Santer, 1er conseiller à la Cour d'appel,

président ff

M. Julien Lucas, 1er conseiller à la Cour d'appel,

assesseur-magistrat

Mme Eliane Eicher, 1er vice-prés. au Trib. d'arr. à Luxbg.,

assesseur-magistrat

M. René Peckels, docteur en droit, Luxembourg,

assesseur-employeur

M. Nicolas Burg, ouvrier des P&T, Luxembourg,

assesseur-salarié

M. Richard Trausch,

secrétaire

 

ENTRE:

l'Association d'assurance contre les accidents, section industrielle, dont le siège est à Luxembourg, représentée par le président de son comité-directeur, monsieur Paul Hansen, docteur en droit, demeurant à Luxembourg,

appelante,

comparant par monsieur Georges Kohn, attaché de direction ler en rang, demeurant à Luxembourg.

ET

B., née le ..., demeurant à ...
intimée,
comparant par Maître Karin Altmeyer, avocat, Luxembourg, en remplacement de maître Paul Theves, avocat-avoué, demeurant à Luxembourg.

Par requête déposée au secrétariat du Conseil supérieur des assurances sociales le 2 mai 1997, l'Association d'assurance contre les accidents, section industrielle, a relevé appel d'un jugement rendu par le Conseil arbitral des assurances sociales le 10 mars 1997 dans la cause pendante entre elle et B. et dont le dispositif est conçu comme suit: Par ces motifs, le Conseil arbitral, statuant contradictoirement et en premier ressort, réformant, dit que l'accident du 9 novembre 1995 est à reconnaître comme accident de trajet indemnisable.

Les parties furent convoquées pour l'audience publique du 12 novembre 1997, à laquelle le rapporteur désigné, madame Eliane Eicher, fit l'exposé de l'affaire.

Monsieur Georges Kohn, pour l'appelante, conclut à la réformation du jugement du Conseil arbitral du 10 mars 1997 et au rétablissement de la décision de la commission des rentes du 23 septembre 1996.

Maître Karin Altmeyer, pour l'intimée, conclut à la confirmation du jugement du Conseil arbitral du 10 mars 1997 et elle réitéra son offre de preuve présentée déjà en première instance.

Après prise en délibéré de l'affaire le Conseil supérieur rendit à l'audience publique de ce jour, à laquelle le prononcé avait été fixé, l'arrêt qui suit:

Par jugement du 10 mars 1997 le Conseil arbitral des assurances sociales a déclaré fondé le recours interjeté par B. contre une décision de la commission des rentes du 23 septembre 1996 ayant confirmé une décision présidentielle du 2 juillet 1996 portant refus de la prise en charge d'un accident de trajet dont l'assurée affirme avoir été victime le 9 novembre 1995, disant que ledit accident est à reconnaître comme accident de trajet indemnisable.

Suivant requête déposée au secrétariat du Conseil supérieur des assurances sociales le 2 mai 1997 l'Association d'assurance contre les accidents, section industrielle, a régulièrement relevé appel de ce jugement.

Par réformation du jugement entrepris elle conclut à voir rétablir la décision de la commission des rentes du 23 septembre 1996.

B. conclut à la confirmation du jugement rendu par le Conseil arbitral des assurances sociales. Elle réitère l'offre de preuve testimoniale par elle présentée en première instance dans les termes suivants:

"que Mademoiselle B. n'a jamais reçu les instructions de déposer l'argent de la caisse dans un trésor de nuit et que, pour déposer l'argent dans un trésor de nuit il faut une clé spéciale ou carte; que Mademoiselle B., le jour de son agression, n'était pas en possession de cette clé spéciale ou carte."

B. était aux services de la s.à r.l. B. exploitant la boucherie " ... " à Luxembourg - en qualité de vendeuse pendant les heures d'ouverture du magasin et comme femme de ménage après les heures de fermeture ayant comme tâche de nettoyer le magasin.

Elle déclare avoir été victime d'une agression, à Esch-sur-Alzette, boulevard Grande-Duchesse Charlotte, le 9 novembre 1995 vers 20.40 heures sur son chemin de retour de son travail , ce de la part de deux ressortissants français à bord d'un véhicule de couleur noire immatriculé en France qui lui auraient arraché son sac à mains contenant notamment la recette du jour de la boucherie.

L'appelante conteste qu'il y a eu agression.

A l'appui de son appel l'Association d'assurance contre les accidents relève que :
l'assurée déclare avoir été agressée par des inconnus sur son chemin de retour; on lui aurait arraché son sac contenant entre autres la recette du jour de la boucherie "...", la Gendarmerie d'Esch-sur-Alzette a dressé un procès-verbal no 95/573 dont il résulte qu'il existe des doutes concernant les affirmations de l'assurée et que celle-ci s'est probablement rendue coupable d'un vol domestique vis-à-vis de son employeur,
en effet, malgré les instructions formelles de son employeur de remettre la recette du jour dans un safe de nuit à Luxembourg, B. a délibérément emporté la recette chez elle à Esch-sur-Alzette, d'autre part, elle n'a pas pu donner une description détaillée du déroulement de l'agression ni de ses agresseurs,
elle s'est rendue le lendemain de l'agression invoquée en consultation médicale et ce seulement après avoir été licenciée par son employeur.

Eu égard aux contestations de l'Association d'assurance contre les accidents il appartient à B. d'apporter la preuve de la réalité de l'accident de trajet par elle invoqué.

A cet égard il y a lieu de constater d'abord l'absence de témoignages quant à l'agression.

S'il résulte d'un certificat médical du 10 novembre 1995 versé au dossier que B. a eu une élongation musculaire de l'épaule droite avec une incapacité de travail de cinq jours, il n'est pas pour autant établi que cette lésion provient de l'accident tel qu'invoqué et décrit par l'assurée.

L'offre de preuve testimoniale formulée par l'intimée ne tend pas non plus à prouver la réalité de l'accident en question. Étant dès lors sans pertinence pour la solution du litige elle est à déclarer irrecevable.

Les conclusions de la partie appelante tendant à voir ordonner la comparution personnelle de B. sont également à rejeter, cette mesure d'instruction ne pouvant avoir comme résultat que de recueillir une fois de plus la seule version des faits de l'assurée ne valant pas preuve.

Compte tenu de ce qui précède, comme le procès-verbal dressé en cause ne fait qu'enregistrer la plainte de B., partant ses propres dires, et que ceux-ci ne sont pas corroborés par un autre élément du dossier, il y a lieu de constater que la preuve du fait accidentel allégué reste en défaut d'être apportée.

L'appel de l'Association d'assurance contre les accidents est partant à déclarer fondé.

Par ces motifs,

le Conseil supérieur des assurances sociales,

statuant sur le rapport oral de l'assesseur-magistrat délégué et les conclusions contradictoires des parties à l'audience,

reçoit l'appel,

déclare l'offre de preuve testimoniale présentée par B. irrecevable,

dit qu'il n'y a pas lieu d'ordonner la comparution personnelle de B.,

dit l'appel fondé,

réformant :

dit que B. n'a pas rapporté la preuve de l'accident de trajet du 9 novembre 1995 invoqué,

rétablit en conséquence la décision de la commission des rentes du 23 septembre 1996.

La lecture du présent arrêt a été faite à l'audience publique du 26 novembre 1997 par le Président du siège Monsieur Georges Santer, en présence de Monsieur Richard Trausch, secrétaire.

 

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