CSSS-12.01.2005

Thème(s)
Accident du travail
Domaine(s)
Notion d'accident
Mot(s) clef(s)
Définitions  | Critères  | Fait précis  | Date certaine  | Travaux lourds pendant plusieurs jours  | Lésion évolutive  | Maladie

Référence

  • CSSS-12.01.2005
  • Aff. AAI c/ M.,épouse C.
  • No. du reg. : GE 2004/0069
  • No.: 2005/0007
  • U200306871

Base légale

  • Art0092-CSS

Sommaire

La notion d'accident du travail repose sur le caractère soudain de la lésion, ce qui signifie que l'événement qui en est la cause a une date certaine et peut être localisé dans le temps et dans l'espace.

En l'espèce, il n'y a pas de lésion soudaine, mais une lésion évolutive à laquelle on ne saurait assigner une origine précise dans le temps. La lésion tendino-musculaire en question est dès lors à qualifier de maladie, et non d'accident du travail.

Corps

GRAND-DUCHE DU LUXEMBOURG

No. du reg.: G 2004/0069 No.: 2005/0007

CONSEIL SUPERIEUR DES ASSURANCES SOCIALES

Audience publique du douze janvier deux mille cinq

 

Composition:

 

Mme Edmée Conzémius, 1er conseiller à la Cour d'appel

président

M. Marc Kerschen, conseiller à la Cour d'appel,

assesseur-magistrat
M. Camille Hoffmann, conseiller à la Cour d'appel, assesseur-magistrat
Mme Diane Fior, gérante, Frisange, assesseur-employeur
M. Didier Wauthij, serrurier, Gostingen, assesseur-salarié
M. Francesco Spagnolo secrétaire

ENTRE:

M., épouse C., née le ..., demeurant à ...,

appelante,

assistée de Monsieur Roger Fohl, secrétaire syndical, demeurant à Dudelange, mandataire de l'appelante suivant procuration spéciale sous seing privé en date du 19 février 2004;

ET:

l'Association d'assurance contre les accidents, section industrielle, dont le siège est à Luxembourg, représentée par le président de son comité-directeur, Monsieur Paul Hansen, docteur en droit, demeurant à Luxembourg,
intimée,
comparant par Monsieur Claude Rumé, attaché de direction 1er en rang, demeurant à Luxembourg.

Par requête déposée au secrétariat du Conseil supérieur des assurances sociales le 29 avril 2004, M., épouse C., a relevé appel d'un jugement rendu par le Conseil arbitral des assurances sociales le 17 mars 2004, dans la cause pendante entre elle et l'Association d'assurance contre les accidents, section industrielle, et dont le dispositif est conçu comme suit: Par ces motifs, le Conseil arbitral, statuant contradictoirement et en premier ressort, reçoit le recours en la forme; au fond en déboute.

Les parties furent convoquées pour l'audience publique du 15 décembre 2004, à laquelle le rapporteur désigné, Monsieur Camille Hoffmann, fit l'exposé de l'affaire.

Monsieur Roger Fohl, pour l'appelante, conclut en ordre principal à la réformation du jugement du Conseil arbitral du 17 mars 2004 et à la reconnaissance de la responsabilité de l'Assurance-accidents-industrielle; en ordre subsidiaire, il conclut à l'institution d'une expertise médicale.

Monsieur Claude Rumé, pour l'intimée, conclut à la confirmation du jugement du Conseil arbitral du 17 mars 2004.

Après prise en délibéré de l'affaire le Conseil supérieur rendit à l'audience publique de ce jour, à laquelle le prononcé avait été fixé, l'arrêt qui suit:

L'assurée M., ouvrière sérigraphe auprès de l'entreprise Villeroy & Boch à Luxembourg, affirme avoir été victime d'un accident du travail le 5 mars 2003 lors du déchargement d'un four de cuisson.

Par décision présidentielle du 6 juin 2003 la prise en charge a été refusée au motif que l'incident, tel qu'il est décrit sur la déclaration d'accident, n'est pas de nature à causer la lésion constatée par le médecin, mais que celle-ci a sa cause dans un état pathologique antérieur.

Cette décision a été maintenue par la commission des rentes de l'Association d'assurance contre les accidents, section industrielle, dans sa séance du 24 octobre 2003 qui relève que:

« A la rubrique 4.08 de la déclaration d'accident - description circonstanciée du déroulement de l'accident - l'employeur a écrit la remarque suivante: "D'après les dires de l'intéressée, l'accumulation des efforts au déchargement qu'elle eut fournis, a entraîné son indisponibilité. Nous devons formuler des réserves au sujet de la régularité de cet accident."

A la rubrique "description sommaire du déroulement de l'accident selon l'assuré" sur le rapport R9, le premier médecin traitant écrit: "douleurs au niveau du bras gauche et du creux axillaire en prenant un plateau lourd de vaisselle" ».

Le recours formé par M. a été déclaré non fondé par jugement du 17 mars 2004 du Conseil arbitral des assurances sociales qui a entériné l'avis de son médecin-conseil qui estime que les « douleurs au niveau du bras gauche et la région axillaire gauche» ne sont pas la suite d'un accident du travail qui suppose la survenue d'une force extérieure agissant de manière soudaine et imprévisible dans un très court laps de temps; qu'en l'espèce, le cadre temporel de la réalisation de la lésion traumatique dépassait largement une journée de travail, étant donnée que, suivant les déclarations de l'assurée, c'est l'accumulation des efforts physiques pendant plusieurs jours qui était à l'origine de l'incident.

M. a relevé appel de ce jugement par requête déposée le 29 avril 2004 au secrétariat du Conseil supérieur des assurances sociales pour entendre dire, par réformation de la décision entreprise, que l'Association d'assurance contre les accidents est tenue de prendre en charge l'accident du 5 mars 2003. Subsidiairement, l'appelante demande l'institution d'une expertise médicale.

A l'appui de son appel, elle se réfère à un rapport d'expertise médicale réalisée par le docteur Marcel FROHN. Cet expert note que suivant certificat médical rédigé le 6 mars 2003 par le docteur JEANTO, M. avait présenté « des cervico-scapulalgies bilatérales par hypersollicitation avec une névralgie cervico-brachiale gauche et lombalgie droite »; que les légères lésions dégénératives d'origine arthrosique affectant les massifs postérieurs du rachis cervical visibles sur les radiographies du 13 mars 2003 étaient révélées par l'incident litigieux, mais ne sont pas susceptibles de générer les lésions constatées le 5 mars 2003; que M. avait fourni un effort violent lors du déchargement du four ce qui explique ces lésions; que partant la présomption que les lésions sont dues à un accident du travail doit s'appliquer; que cependant l'indemnisation des séquelles provenant de l'accident du 5 mars 2003 ne devrait pas s'étendre aux lésions antérieures à l'accident.

Il ressort de l'avis médical dressé le 19 février 2004 par le médecin-conseil du Conseil arbitral des assurances sociales, sous le point «Anamnèse et plaintes actuelles de l'assurée» que celle-ci travaillait normalement comme sérigraphe, mais que suite à une réorganisation du travail à l'intérieur de l'entreprise Villeroy & Boch, elle avait été chargée de vider les fours de cuisson de la céramique cuite; qu'elle avait accompli cette tâche pendant environ deux semaines et demi avant l'incident du 5 mars 2003. Suivant le certificat délivré le 21 juin 2003 par le neurologue le docteur Martine ZEYEN, les cervico-brachialgies étaient survenues suite à un travail lourd durant plusieurs jours, décompensées le 5 mars 2003. Les douleurs tendinomusculaires au niveau du bras gauche et de la région axillaire gauche étaient par conséquent dues à un surmenage qui s'était étendu dans le temps durant plusieurs jours d'affilée. Il est établi par les certificats et avis médicaux versés en cause que la lésion inflammatoire tendinomusculaire, à l'origine des douleurs, s'est installée progressivement pendant un laps de temps indéterminé s'étendant sur plusieurs jours.

Or la notion d'accident du travail repose sur le caractère soudain de la lésion, ce qui signifie que l'événement qui en est la cause a une date certaine et peut être localisé dans le temps et dans l'espace (Jurisclasseur, sécurité sociale, accident du travail, fasc. 310, n° 145). Cependant, en l'espèce, il n'y a pas de lésion soudaine, mais une lésion évolutive à laquelle on ne saurait assigner une origine précise dans le temps. La lésion tendino-musculaire en question est dès lors à qualifier de maladie, et non d'accident du travail.

La demande subsidiaire tendant à l'institution d'une expertise médicale pour établir que la pathologie dont souffrait l'appelante était imputable à l'accident du 5 mars 2003 est à déclarer irrecevable comme non pertinente.

Le jugement entrepris est par conséquent à confirmer.

Par ces motifs,

et ceux des juges de première instance,

le Conseil supérieur des assurances sociales,

statuant contradictoirement, sur le rapport oral de l'assesseur-magistrat délégué,

déclare l'appel recevable,

dit irrecevable la demande tendant à l'institution d'une expertise médicale,

déclare l'appel non fondé,

confirme le jugement entrepris.

La lecture du présent arrêt a été faite à l'audience publique du 12 janvier 2005 par Madame le Président Edmée Conzémius, en présence de Monsieur Francesco Spagnolo, secrétaire.

Le Président, Le Secrétaire,

signé: Conzémius signé: Spagnolo

 

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