GRAND-DUCHE DU LUXEMBOURG
No. du reg.: G 2005/0109 No.: 2006/0102
CONSEIL SUPERIEUR DES ASSURANCES SOCIALES
Audience publique du seize mai deux mille six
Composition: | |
Mme Edmée Conzémius, 1er conseiller à la Cour d'appel, | président |
M. Marc Kerschen, 1er conseiller à la Cour d'appel, | assesseur-magistrat |
Mme Lotty Prussen, conseiller à la Cour d'appel, | assesseur-magistrat |
M. Henri Goedert, docteur en droit, Luxembourg, | assesseur-employeur |
M. Jean-Claude Delleré, tourneur, Grosbous, | assesseur-salarié |
Mme Iris Klaren, secrétaire | secrétaire |
ENTRE:
S., né le ..., demeurant à ..., appelant, assisté de Maître Julien Leclère, avocat-avoué, demeurant à Luxembourg;
ET:
l'Association d'assurance contre les accidents, section industrielle, dont le siège est à Luxembourg, représentée par le président de son comité-directeur, Monsieur Paul Hansen, docteur en droit, demeurant à Luxembourg, intimée, comparant par Monsieur Marion Frisch, inspecteur principal, demeurant à Luxembourg.
Par requête déposée au secrétariat du Conseil supérieur des assurances sociales le 16 juin 2005, S. a relevé appel d'un jugement rendu par le Conseil arbitral des assurances sociales le 3 mai 2005, dans la cause pendante entre lui et l'Association d'assurance contre les accidents, section industrielle, et dont le dispositif est conçu comme suit: Par ces motifs, le Conseil arbitral, statuant contradictoirement et en premier ressort, reçoit le recours en la forme; au fond en déboute.
Les parties furent convoquées pour l'audience publique du 3 mai 2006, à laquelle le rapporteur désigné, Monsieur Marc Kerschen, fit l'exposé de l'affaire.
Maître Julien Leclère, pour l'appelant, maintint les conclusions de la requête d'appel déposée au siège du Conseil supérieur le 16 juin 2005.
Monsieur Marion Frisch, pour l'intimée, conclut à la confirmation du jugement du Conseil arbitral du 3 mai 2005.
Après prise en délibéré de l'affaire le Conseil supérieur rendit à l'audience publique de ce jour, à laquelle le prononcé avait été fixé, l'arrêt qui suit:
Par jugement contradictoire du 3 mai 2005 le Conseil arbitral des assurances sociales a déclaré non fondé le recours formé par S. contre une décision du comité-directeur de l'Association d'assurance contre les accidents, section industrielle, du 18 novembre 2004 ayant confirmé une décision présidentielle du 28 juillet 2004 laquelle décision avait décliné la responsabilité de l'Association d'assurance contre les accidents quant à un événement accidentel du 29 mai 2004 au motif que l'incident tel qu'il est décrit dans la déclaration d'accident n'est pas de nature à causer la lésion constatée par le médecin.
Pour statuer comme ils l'ont fait les juges de première instance ont entériné les conclusions de leur médecin-conseil selon lequel il n'y pas eu d'accident du travail puisque la lombalgie s'est déclarée lors d'un mouvement physiologique sans l'intervention d'une force extérieure agissant de manière soudaine et imprévisible. Le Conseil arbitral des assurances sociales a encore fait siennes les conclusions de son médecin-conseil en ce qu'il a relevé que les bilans radiologiques démontrent un état pathologique antérieur avec au niveau L5-S1 une importante discopathie avec protrusion, qu'en L3-L4 le scanner n'objective pas de hernie discale ni de protrusion, que celle-ci n'est objectivée que par l'IRM lombaire du 9 juillet 2004 de sorte qu'elle doit être apparue après le 30 mai 2004, date de la réalisation du scanner et ne peut donc pas être rapportée à l'incident du 29 mai 2004, que cette IRM ne montre ni une hernie discale en L4-L5 ni en L5-S1 et qu'en L5-S1 il y a un rétro-listhésis dégénératif de L5 sur S1, un rétro-listhésis qui apparaît dans l'enfance et n'est pas la suite d'un effort à l'âge adulte.
S. a régulièrement relevé appel de ce jugement par requête déposée le 16 juin 2005. .
Il demande au Conseil supérieur des assurances sociales de dire par réformation du jugement entrepris que la lésion dont il souffre a bien été causée par un événement isolé et d'en ordonner par conséquent la prise en charge par l'Association d'assurance contre les accidents.
L'intimée conclut à la confirmation du jugement de première instance.
Il est constant en cause que S. a le 29 mai 2004 en soulevant un bloc destiné à la construction d'un mur ressenti une douleur violente dans le dos irradiant dans la jambe gauche et l'empêchant de poursuivre son travail.
Le requérant est allé consulter le lendemain un médecin et un scanner lombaire réalisé le même jour a relevé une importante discopathie en L5-S1 avec protrusion disco-ostéophytique médiane. et en barre diffuse sans latéralisation nette rétrécissant des deux côtés les trous de conjugaison et rétrécissant aussi légèrement le canal rachidien et venant au contact des émergences radiculaires S1 sans les comprimer.
Dans un certificat médical établi le 10 mai 2006 le docteur Jean LALLEMANG certifie que S. ne se plaignait pas de lombalgies avant son accident du travail et que suite à cet accident des lombalgies rebelles se sont établies avec des signes de souffrance radiculaire pour lesquels le requérant vient de subir une intervention de spondylodèse en L5-S1, les autres segments intervertébraux étant tout à fait intacts.
Il est inexact de raisonner comme l'ont fait les juges de première instance qu'il n'y a pas eu d'accident du travail en l'espèce au motif que la lombalgie dont souffre le requérant se serait déclarée sans l'intervention d'une force extérieure agissant de manière soudaine et imprévisible et qu'il en aurait été différemment si S. avait trébuché, perdu l'équilibre ou si la brouette avait heurté un obstacle avec la roue.
En effet tout accident qui se produit par le fait ou à l'occasion du travail est présumé être un accident du travail, sauf à l'organisme de sécurité sociale de rapporter la preuve que l'atteinte au corps humain est due à une cause étrangère à l'emploi assuré.
Les lésions dont souffre S. sont apparues au cours du travail effectué par lui et consistant à soulever une charge lourde de sorte que ces lésions sont par application du principe ci-avant énoncé présumées constituer un accident du travail.
L'Association d'assurance contre les accidents n'a par ailleurs pas rapporté la preuve que les lésions subies par S. soient dues à une cause étrangère à l'emploi assuré.
En effet si selon le médecin-conseil du Conseil arbitral des assurances sociales les bilans radiologiques démontrent un état pathologique antérieur au niveau L5-S1, il n'en reste pas moins que cet état préexistant n'avait pas occasionné lui-même d'incapacité avant l'accident du travail mais a été aggravé par ledit accident.
Il résulte des développements qui précèdent que l'accident dont a été victime S. est à considérer comme accident du travail.
L'appel de S. est partant à déclarer fondé.
Par ces motifs,
le Conseil supérieur des assurances sociales,
statuant sur le rapport oral de l'assesseur-magistrat délégué et les conclusions contradictoires des parties à l'audience,
reçoit l'appel en la forme,
le dit fondé,
REFORMANT:
dit que l'accident dont a été victime S. le 29 mai 2004 est à considérer comme accident du travail,
dit que les lésions en résultant sont à prendre en charge par l'Association d'assurance contre les accidents,
renvoie l'affaire devant l'organe compétent de l'Association d'assurance contre les accidents pour la fixation des prestations revenant à S..
La lecture du présent arrêt a été faite à l'audience publique du 16 mai 2006 par Madame le Président Edmée Conzémius, en présence de Madame Iris Klaren, secrétaire.
Le Président, signé: Conzémius
Le Secrétaire, signé: Klaren