CSSS-12.01.2005

Thème(s)
Accident du travail
Domaine(s)
Rupture du lien de connexité avec le travail
Mot(s) clef(s)
Lors d'une activité sportive le weekend  | Football corporatif  | Championnat  | Activités à caractère compétitif  | Aspect récréatif  | Rupture avec l'activité professionnelle assurée

Référence

  • CSSS-12.01.2005
  • Aff. AAI c/ T.
  • No. du reg. : GE 2004/0117
  • No.: 2005/0012
  • U200328743

Base légale

  • Art0085-CSS
  • Art0090-CSS

Sommaire

Il est constant en cause que l'accident en question n'était survenu ni par le fait du travail ni à l'occasion du travail de l'assuré; que la rencontre de football en cause avait eu lieu pendant le week-end en dehors du temps de travail et sur un terrain mis à disposition par le club de football d'Eischen; que la rencontre de football se déroulait dans le cadre du championnat des équipes corporatives. Les équipes corporatives forment une association dénommée «Football Corporatif Luxembourgeois », en abrégé F.C.L. Cette association est liée à la Fédération Luxembourgeoise de Football (F.L.F.) par une convention (cf. statuts de la F.L.F. - a.s.b.l., article 20-01).

Suivant cette convention, le « Football Corporatif Luxembourgeois» est administré sous le contrôle du Conseil d'Administration de la F.L.F. par un comité élu par les clubs corporatifs et comprenant un membre du Conseil d'Administration de la F.L.F. Le Comité F.C.L. est considéré comme instance fédérale; il gère le football corporatif luxembourgeois de façon semi-autonome en appliquant la convention conclue entre l'a.s.b.l. «Football Corporatif Luxembourgeois» et la F.L.F. ainsi que le règlement interne du F.C.L. et les statuts et règlements de la F .L.F. Le football corporatif organise son propre championnat, ses coupes ainsi que ses rencontres amicales.

Il s'ensuit que l'employeur était étranger à la rencontre de championnat entre les équipes du F. C. C. H. de Luxembourg et du F. C. C..
La circonstance que l'employeur fait régulièrement des dons en argent à l'équipe du C. H. de Luxembourg n'implique pas qu'il participe à quelque titre que ce soit à l'organisation de l'équipe C.H.L. et à l'organisation des rencontres de football qu'elle dispute. Il échet encore de relever que le caractère compétitif du championnat du football corporatif prévaut sur l'aspect purement récréatif.

La déclaration de l'intimé qu'il se serait senti obligé moralement de participer à la rencontre dans l'espoir d'obtenir une prolongation de son contrat de travail est sans pertinence, l'accident de travail étant défini par des critères légaux objectivement vérifiables et non pas par les croyances et les sentiments des assurés.

Corps

GRAND-DUCHE DU LUXEMBOURG

No. du reg.: GE 2004/0117 No.: 2005/0012

CONSEIL SUPERIEUR DES ASSURANCES SOCIALES

Audience publique du douze janvier deux mille cinq

Composition:  
Mme Edmée Conzémius, 1er conseiller à la Cour d'appel, président
M. Marc Kerschen, conseiller à la Cour d'appel, assesseur-magistrat
M. Camille Hoffmann, conseiller à la Cour d'appel, assesseur-magistrat
M. André Medernach, employé privé e.r., Luxembourg assesseur-employeur
Mme Irène Weber, employée privée e.r., Luxembourg, assesseur-salarié
M. Francesco Spagnolo, secrétaire

 

ENTRE:

l'Association d'assurance contre les accidents, section industrielle, dont le siège est à Luxembourg, représentée par le président de son comité-directeur, Monsieur Paul Hansen, docteur en droit, demeurant à Luxembourg,

appelante,

comparant par Monsieur Claude Rumé, attaché de direction 1er en rang, demeurant à Luxembourg;

ET:

T., né le ..., demeurant à...,

intimé,

comparant par Maître Fabienne Mondot, avocat-avoué, demeurant à Luxembourg;

Par requête déposée au secrétariat du Conseil supérieur des assurances sociales le 16 juillet 2004, l'Association d'assurance contre les accidents, section industrielle, a relevé appel d'un jugement rendu par le Conseil arbitral des assurances sociales le 14 juin 2004, dans la cause pendante entre elle et T., et dont le dispositif est conçu comme suit: Par ces motifs, le Conseil arbitral, statuant contradictoirement et en premier ressort, réformant, dit que la responsabilité de l'Assurance-accidents-industrielle est engagée en ce qui concerne l'accident dont le requérant a été victime le 10 mai 2003 et qui est à reconnaître comme accident du travail au sens de la loi; renvoie l'affaire devant l'organe de décision compétent de l'Association d'assurance contre les accidents pour détermination des prestations.

Les parties furent convoquées pour l'audience publique du 15 décembre 2004, à laquelle le rapporteur désigné, Monsieur Camille Hoffmann, fit l'exposé de l'affaire.

Monsieur Claude Rumé, pour l'appelante, maintint les moyens et conclusions de la requête d'appel déposée au siège du Conseil supérieur le 16 juillet 2004.

Maître Fabienne Mondot, pour l'intimé, conclut à la confirmation du jugement du Conseil arbitral du 14 juin 2004.

Après prise en délibéré de l'affaire le Conseil supérieur rendit à l'audience publique de ce jour, à laquelle le prononcé avait été fixé, l'arrêt qui suit:

T. soutient avoir été blessé à l'épaule droite lors d'une rencontre de football du championnat des équipes corporatives opposant, le samedi 10 mai 2003, vers 17:15 heures, sur le terrain de football de Clausen-Cents, les équipes du F. C. C. H. dont T. fit partie, et du F. C. C..

La première consultation médicale eut lieu le 25 juillet 2003. Le 31 octobre 2003, le docteur Robert HUBERTY avait diagnostiqué la rupture d'un tendon à l'épaule droite. L'accident fut déclaré au patron le
9 octobre 2003.

Par décision présidentielle du 1er décembre 2003, maintenue par décision de son comité-directeur du 19 février 2004, l'Association d'assurance contre les accidents, section industrielle, a refusé la prise en charge de l'accident au motif que celui-ci était survenu lors d'une activité sportive, exercée dans le cadre d'un championnat, donc de nature compétitive, non organisée par l'employeur et sans lien avec le travail de l'assuré.

Sur le recours formé par T. contre la décision de refus de prise en charge, le Conseil arbitral des assurances sociales a, par jugement du 14 juin 2004, dit que l'accident dont a été victime l'assuré doit être qualifié d'accident du travail au sens de la loi et a renvoyé la cause devant l'Association d'assurance contre les accidents pour détermination des prestations.

Pour statuer ainsi, le Conseil arbitral des assurances sociales a retenu:

« qu'il résulte des déclarations de l'intéressé entendu en personne à l'audience du 18 mai 2004 qu'il s'est considéré comme obligé de participer au match en question afin de représenter son employeur pour que son équipe gagne à ce match et que cette participation se situait dans l'espoir de bénéficier de la bienveillance de son patron en vue d'une prolongation de son contrat de travail qui allait venir à expiration après quelques semaines;

que cette version des motifs de la participation est rendue crédible dans le cas du requérant par le fait qu'il avait connu dans les années 1999, 2000 et 2001 des périodes prolongées sans emploi au cours desquelles il était au chômage, ayant donné lieu à un contentieux au sujet de l'indemnisation suite à un recours présenté auprès du Conseil arbitral par le Ministre du Travail ayant contesté une décision de prolongation du bénéfice des prestations de chômage (voir: affaire F. CH. 2/02);

que même s'il n'existait pas d'obligation juridique de participer à ce match, toujours est-il que l'assuré a considéré qu'il était nécessaire en vertu d'une obligation morale de représenter les couleurs de son employeur à ce match, de sorte que par une interprétation extensive, qui est permise par l'article 92 alinéa 1er, du Code en corrélation avec l'article 85, alinéa 1er sous 1), il y a lieu de retenir l'existence au moment de l'accident d'un lien de connexité suffisant avec l'exécution du contrat de travail ayant lié le requérant à son employeur ».

L'Association d'assurance contre les accidents, section industrielle, a relevé appel de ce jugement par requête entrée le 16 juillet 2004 au secrétariat du Conseil supérieur des assurances sociales, pour entendre dire, par réformation de la décision entreprise, que l'accident en cause est extraprofessionnel et n'est pas à considérer comme accident du travail et qu'il y a lieu de rétablir la décision du comité-directeur.

Subsidiairement, l'appelante conteste encore tout lien de causalité entre la lésion dont fait état l'intimé et l'accident en question. Elle fait valoir que l'intimé avait déclaré deux autres accidents de travail qui auraient tous les deux entraîné une lésion du bras droit, à savoir en premier lieu un accident du 16 mai 2003 survenu lors d'une rencontre de football et en second lieu un accident du 24 mai 2004 survenu lors du travail au Centre Hospitalier.

L'appelante fait valoir que par une interprétation extensive des textes légaux, elle prend en charge les accidents survenus lors d'activités sportives qui sont organisées ou autorisées par l'employeur sous forme d'une section sportive de l'entreprise, dans l'intérêt de l'activité professionnelle et qui ont un but récréatif; que par contre sont exclues de la prise en charge des activités à caractère compétitif organisées à titre privé par quelques membres du personnel.

Il est constant en cause que l'accident en question n'était survenu ni par le fait du travail ni à l'occasion du travail de l'assuré; que la rencontre de football en cause avait eu lieu pendant le week-end en dehors du temps de travail et sur un terrain mis à disposition par le club de football d'Eischen; que la rencontre de football se déroulait dans le cadre du championnat des équipes corporatives.

Les équipes corporatives forment une association dénommée «Football Corporatif Luxembourgeois », en abrégé F.C.L. Cette association est liée à la Fédération Luxembourgeoise de Football (F.L.F.) par une convention (cf. statuts de la F.L.F. - a.s.b.l., article 20-01).

Suivant cette convention, le « Football Corporatif Luxembourgeois» est administré sous le contrôle du Conseil d'Administration de la F.L.F. par un comité élu par les clubs corporatifs et comprenant un membre du Conseil d'Administration de la F.L.F. Le Comité F.C.L. est considéré comme instance fédérale; il gère le football corporatif luxembourgeois de façon semi-autonome en appliquant la convention conclue entre l'a.s.b.l. «Football Corporatif Luxembourgeois» et la F.L.F. ainsi que le règlement interne du F.C.L. et les statuts et règlements de la F.L.F. Le football corporatif organise son propre championnat, ses coupes ainsi que ses rencontres amicales.

Il s'ensuit que l'employeur était étranger à la rencontre de championnat entre les équipes du F. C. C. H. de Luxembourg et du F. C. C..

La circonstance que l'employeur fait régulièrement des dons en argent à l'équipe du Centre Hospitalier de Luxembourg n'implique pas qu'il participe à quelque titre que ce soit à l'organisation de l'équipe C.H.L. et à l'organisation des rencontres de football qu'elle dispute. Il échet encore de relever que le caractère compétitif du championnat du football corporatif prévaut sur l'aspect purement récréatif.

La déclaration de l'intimé qu'il se serait senti obligé moralement de participer à la rencontre dans l'espoir d'obtenir une prolongation de son contrat de travail est sans pertinence, l'accident de travail étant défini par des critères légaux objectivement vérifiables et non pas par les croyances et les sentiments des assurés.

Il y a enfin lieu de remarquer que les joueurs, titulaires de licences corporatives, sont affiliés de plein droit à la Caisse de Secours Mutuels des Sportifs.

L'appel est par conséquent fondé.

Par ces motifs,

le Conseil supérieur des assurances sociales,

statuant contradictoirement, sur le rapport oral de l'assesseur-magistrat délégué,

déclare l'appel recevable,

le dit fondé,

REFORMANT:

déclare non fondé le recours introduit par T. contre la décision de refus de prise en charge rendue le 19 février 2004 par le comité-directeur de l'Association d'assurance contre les accidents, section industrielle,

dit que cette décision sortira ses pleins et entiers effets.

La lecture du présent arrêt a été faite à l'audience publique du 12 janvier 2005 par Madame le Président Edmée Conzémius, en présence de Monsieur Francesco Spagnolo, secrétaire.

Le Président, Le Secrétaire,

signé: Conzémius signé: Spagnolo

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