GRAND-DUCHE DU LUXEMBOURG
No. du reg.: G 2007/0210 No.: 2008/0149
CONSEIL SUPERIEUR DES ASSURANCES SOCIALES
Audience publique du neuf juillet deux mille huit
Composition: | |
Mme Edmée Conzémius, président de chambre à la Cour d'appel, | président |
M. Marc Kerschen, 1er conseiller à la Cour d'appel, | assesseur-magistrat |
Mme Lotty Prussen, conseiller à la Cour d'appel, | assesseur-magistrat |
M. Henri Goedert, docteur en droit, Luxembourg, | assesseur-employeur |
M. Marcel Kraus, ouvrier de l'Etat, Leudelange, | assesseur-salarié |
Mme Iris Klaren, | secrétaire |
ENTRE:
F., né le ..., demeurant à...,
appelant,
assisté de Monsieur Serge Urbany, secrétaire syndical, demeurant à Sanem, mandataire de l'appelant suivant procuration spéciale sous seing privé en date du 1er février 2007;
ET:
l'Association d'assurance contre les accidents, section industrielle, dont le siège est à Luxembourg, représentée par le président de son comité-directeur, Monsieur Paul Hansen, docteur en droit, demeurant à Luxembourg,
intimée,
comparant par Madame Pascale Speltz, attaché de direction, demeurant à Luxembourg.
Par requête déposée au secrétariat du Conseil supérieur des assurances sociales le 14 décembre 2007, F. a relevé appel d'un jugement rendu par le Conseil arbitral des assurances sociales le 23 octobre 2007, dans la cause pendante entre lui et l'Association d'assurance contre les accidents, section industrielle, et dont le dispositif est conçu comme suit:
Par ces motifs, le Conseil arbitral, statuant contradictoirement et en premier ressort, déclare le recours non fondé et confirme la décision entreprise.
Les parties furent convoquées pour l'audience publique du 2 juillet 2008, à laquelle Madame le président fit le rapport oral.
Monsieur Serge Urbany, pour l'appelant, maintint les conclusions de la requête d'appel déposée au siège du Conseil supérieur le 14 décembre 2007, sinon il conclut à voir procéder à une audition de témoin.
Madame Pascale Speltz, pour l'intimée, conclut à la confirmation du jugement du Conseil arbitral du 23 octobre 2007.
Après prise en délibéré de l'affaire le Conseil supérieur rendit à l'audience publique de ce jour, à laquelle le prononcé avait été fixé, l'arrêt qui suit:
F. avait subi le 7 juin 2005 un accident du travail en se cognant la tête contre l'échafaudage. Par décision du comité-directeur du 25 janvier 2007 une rente viagère de 1% lui fut accordée à partir du 10 juin 2005. Par décision du même jour, l'Association d'assurance contre les accidents refusa la prise en charge du traitement de l'épaule.
Sur recours devant le Conseil arbitral des assurances sociales contre ces deux décisions, cette juridiction, par entérinement de l'avis de son médecin-conseil, confirma les décisions entreprises par jugement du 23 octobre 2007.
F. saisit le Conseil supérieur des assurances sociales d'un appel selon requête déposée dans les forme et délai de la loi le 14 décembre 2007. Il demande au Conseil supérieur des assurances sociales de retenir la causalité directe entre l'accident et la lésion de son épaule gauche et ainsi la responsabilité de l'Association d'assurance contre les accidents et de prendre en considération la pathologie de l'épaule dans l'estimation de la rente viagère. En ordre subsidiaire l'appelant sollicite l'institution d'une expertise.
Un avis du Contrôle médical de la sécurité sociale du 11 mai 2006 retient des douleurs au niveau de l'épaule gauche avec capsulite rétractile, mais n'établit pas de relation causale avec l'accident du travail. Le 3 août 2006, après un contrôle du récit de l'accident, le Contrôle médical de la sécurité sociale a précisé que l'épaule n'avait pas été touchée lors de l'accident et que la responsabilité de l'Association d'assurance contre les accidents ne serait pas engagée. Le médecin-conseil du Conseil arbitral des assurances sociales rejette toute relation causale entre les douleurs à l'épaule détectées 9 à 12 mois après l'accident et l'accident lui-même.
La déclaration patronale est claire: l'assuré social a déclaré lui-même qu'il se serait heurté la tête dès lors que son casque était tombé lorsqu'il s'était baissé pour ramasser des gravats sous l'échafaudage. Il n'était pas question de chute sur l'épaule ni de douleur à ce niveau.
L'Association d'assurance contre les accidents avait fait procéder à une enquête complémentaire dès lors que le récit du médecin traitant du 13 décembre 2005 divergeait avec la déclaration patronale. Le patron a maintenu sa position et a exclu tous travaux de forage lors desquels la blessure à l'épaule se serait produite. La théorie des travaux de forage n'est d'ailleurs apparue la première fois que lors de l'examen médical du 13 décembre 2005, 6 mois après l'accident.
Il appartient au demandeur en réparation d'établir que l'accident est survenu dans le cours de l'exécution de son contrat de travail. Lorsque ce fait est établi, et seulement dans ce cas, il y a présomption que l'accident est survenu par le fait de l'exécution du contrat. Or la présomption n'existe que dans la mesure où les lésions se sont manifestées immédiatement après l'accident "ou dans un temps voisin" (Cas.s. soc., 19 déc. 1954: Bull, civ. 1954, IV, n° 831. - Cass. soc., 7 mars 1963: Bull. civ. 1963, IV, n° 229. - Cass. soc., 6 janv. 1977: Bull. civ. 1977, V, n° 8) ou qu'il y ait continuité des soins (Cass. soc., 7 juill. 1986: Bull. civ. 1986, V, n° 359) ou persistance des symptômes depuis le fait accidentel (Cass. soc., 8 mars 1989: Bull civ. 1989, V, n° 190. - Cass. soc., 6 déc. 1990: Jurispr. soc. ç-T UIMM1991,p. 118).
En revanche, les lésions à manifestations tardives ne profitent plus de la présomption d'imputabilité. (Cass. soc., 13 févr. 1997: Bull. civ. 1997, V, n° 66; RJS 3/1997 n° 331. -Cass. soc., 31 oct. 2000: JCP E 2001, p. 992, obs. G. Vachet; Jurispr. soc. UIMM 200...,p.388)
En d'autres termes, il appartient à l'appelant de rapporter la preuve de la relation causale entre ses blessures à l'épaule et l'accident du 7 juin 2005. En l'état du dossier, cette preuve n'est pas rapportée. Toute relation causale est au contraire contredite par la déclaration patronale qui reprend les dires de l'ouvrier sur le déroulement de l'accident et sur les blessures subies de sorte que toute cause à effet est exclue. L'attestation testimoniale basée sur des suppositions n'est d'aucune pertinence et ne permet pas de retenir la causalité, vu l'absence de consultation médicale permettant de retenir une douleur réelle et effective au niveau de l'épaule.
Le jugement entrepris est à confirmer sans qu'il y ait lieu à expertise ou à enquête complémentaires.
Par ces motifs
le Conseil supérieur des assurances sociales,
statuant sur le rapport oral de son président et contradictoirement à l'égard des parties en cause,
reçoit l'appel en la forme,
déclare irrecevable l'offre de preuve présentée,
dit l'appel non fondé et confirme la décision entreprise.
La lecture du présent arrêt a été faite à l'audience publique du 9 juillet 2008 par Madame le Président Edmée Conzémius, en présence de Madame Iris Klaren, secrétaire.
Le Président,
signé: Conzémius
Le Secrétaire,
signé: Klaren