CASS 09.03.2015

Themen
Procédure administrative
page.jurisprudence.domaines
page.jurisprudence.keysword
Rachat d'une rente  | Pouvoir discrétionnaire de l'administration  | Contrôle juridictionnel  | Opportunité  | Régularité  | Procédure administrative non contentieuse

Référence

  • CASS-09.03.2015
  • Reg. N° G 373/14

Base légale

  • Art. 113 CSS
  • Loi du 1er décembre 1978 (PANC)

Sommaire

L’AAA a refusé la demande en allocation de la somme-capital correspondant au rachat de la rente viagère de l’assuré.

Les juges ont confirmé le refus en retenant que l’AAA dispose d’un pouvoir d’appréciation très large sur l’appréciation de l’opportunité de la substitution du versement d’un capital au paiement d’une rente. La régularité de cette décision peut néanmoins être soumise à un contrôle juridictionnel.

Corps

GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG

Conseil Arbitral de la Sécurité Sociale

Audience publique du neuf mars deux mille quinze

Composition:  
M. Paul Capésius président du siège
M. Jean Seil
assesseur-employeur
M. Marcel Biwer assesseur-assuré
ces deux derniers dûment assermentés,  
Mme Véronique Szymanski
secrétaire

Entre:

G., né le ***, demeurant à *** ;

demandeur,

comparant en personne assisté de Maître Lise Reibel, avocat à la Cour, en remplacement de Maître Claude Wassenich, avocat à la Cour, Luxembourg ;

 

Et:

l’Association d’assurance accident, dont le siège est à Luxembourg, représentée par le président de son comité-directeur, Monsieur Claude Seywert, demeurant à Luxembourg ;

défenderesse,

comparant par Monsieur F., inspecteur principal Ier en rang, Luxembourg, mandataire suivant procuration écrite ;

 

Par requête déposée au siège du Conseil arbitral de la sécurité sociale en date du 29 août 2014, le requérant forma recours contre une décision du comité-directeur de l’Association d’assurance accident du 10 juillet 2014.

Par lettres recommandées à la poste en date du 8 janvier 2015, les parties furent convoquées à l’audience publique du 10 février 2015, à laquelle le requérant comparut en personne assisté de Maître Lise Reibel, préqualifiée.

La partie défenderesse comparut par son mandataire Monsieur F., préqualifié.

Le président du siège ouvrit les débats par un exposé de l’affaire.

Ensuite, les parties présentèrent leurs observations.

La partie requérante conclut à la réformation de la décision attaquée.

La partie défenderesse conclut à la confirmation de la décision attaquée.

Après prise en délibéré de l’affaire, le Conseil arbitral de la sécurité sociale rendit à l’audience publique de ce jour, à laquelle le prononcé avait été fixé, le jugement qui suit :

Attendu que le requérant G. fait grief à une décision du comité-directeur de l’Association d’assurance accident du 10 juillet 2014 d’avoir refusé la demande en allocation de la somme-capital correspondant au rachat de la rente viagère de 10% dont l’intéressé bénéficie en indemnisation de l’accident du travail dont il fut victime le 16 décembre 2005 ;

Attendu que le recours est recevable pour avoir été présenté dans les formes et délai prévus par la loi ;

Attendu que les éléments de fait à la base de la décision du comité-directeur ont été précisés comme suit :

« Par une demande introduite en date du 11 avril 2014, l’assuré a sollicité le rachat de sa rente accident viagère de 10% d’incapacité partielle permanente qu’il touche en raison d’un accident du travail ayant laissé des séquelles au dos. Actuellement, la rente accident mensuelle s’élève à 368,06 euros et, en cas de rachat, le montant en capital serait de 68.501,56 euros. Il bénéficiait déjà de quatre rentes en raison d’autres accidents, à savoir : un taux de 3% suite à un accident du 8 janvier 1998 (U***), un taux de 8% suite à un accident du 14 mai 1998 (U***), un taux de 5% suite à un accident du 1er septembre 1998 (U***) et un taux de 3% suite à un accident du 30 janvier 2006 (U***), de sorte que le taux global s’élève actuellement à 29%.

L’assuré justifie sa requête par le fait qu’il veut rembourser un prêt personnel et rénover sa maison d’habitation. Il a joint quatre devis pour un montant total de 51.063,03 euros.

Au moment de l’accident l’assuré était occupé en qualité de tôlier auprès de l’entreprise G*** établie à B*** et percevait un salaire annuel brut de 40.846,- euros. Depuis le 15 avril 2014 il est au chômage et touche une indemnité de chômage de 3.597,65 euros par mois. Il est marié et a deux enfants (15 et 20 ans) à sa charge. Sa conjointe ne touche aucun revenu. Il est propriétaire d’une maison grevée d’une dette hypothécaire de 1.980,- euros par mois.

L’Administration communale de S***, par un avis du 29 avril 2014, a déclaré ne pas s’opposer à la liquidation du capital. » ;

Attendu que l’ancien article 113 du Code de la sécurité sociale applicable, comme en l’espèce, aux accidents survenus avant le 1er janvier 2010 dispose comme suit :

1.            Lorsque l’état d’un blessé paraît ne plus devoir donner lieu à modification les rentes inférieures à dix pour cent seront rachetées par le versement du capital correspondant.

2.            Dans les mêmes conditions, le comité directeur peut, sur demande de l’intéressé, substituer au service des rentes inférieures à quarante pour cent le versement du capital correspondant, le collègue échevinal de la résidence du bénéficiaire entendu.

3.            En cas d’accidents successifs il sera tenu compte des suites globales de ces accidents pour la détermination du degré d’incapacité au regard des dispositions qui précèdent.

10.          Le comité directeur peut accorder des avances sur les rentes même supérieures à quarante pour cent en vue de l’établissement professionnel du bénéficiaire ou d’une acquisition ou construction immobilière ; il entendra préalablement le collège échevinal de la résidence du bénéficiaire. L’avance pourra être subordonnée à une garantie hypothécaire et à une stipulation d’intérêts ne dépassant pas quatre pour cent.

Attendu que la disposition légale précitée laisse un pouvoir discrétionnaire à l’Association d’assurance accident sur la question de l’appréciation de l’opportunité de la substitution du versement d’un capital au paiement d’une rente et laisse dès lors un pouvoir d’appréciation très large à l’Association d’assurance ;

Attendu qu’il ne faut néanmoins pas tirer de cette constatation que la décision prise sur base de l’article 113, alinéa 2 serait soustraite à toute voie de recours ;

Attendu que le fait que l’Association d’assurance dispose d’un pouvoir discrétionnaire relatif à la décision à prendre dans le cadre de l’article 113, alinéa 2 signifie uniquement que cette décision ne peut pas faire l’objet d’un recours visant à contrôler l’opportunité de cette décision (cf. : arrêt du Conseil supérieur des assurances sociales du 6 novembre 1997, affaire R. c/AAI) ;

Attendu que la régularité de la décision prise dans le cadre de cet article peut néanmoins être soumise à un contrôle juridictionnel dans le cadre de la loi du 1er décembre 1978 relative à la procédure administrative non contentieuse, alors que les dispositions de cette loi sont d’application générale et constituent un minimum de garanties auxquelles l’administré doit pouvoir s’attendre lorsqu’il est confronté à une administration (cf. : Travaux préparatoires, n° 2209, exposé des motifs, p. 2 et s. ; F. Schockweiler, Le contentieux administratif et la procédure administrative non contentieuse en droit luxembourgeois, n° 349) ;

Attendu que pour assurer une pleine et entière efficacité aux dispositions de cette loi, il faut que l’administré dispose d’une voie de recours contre la décision qu’il estime avoir été prise au mépris des règles retenues dans ce texte ;

qu’il faut en conclure que tout justiciable doit disposer d’un recours contre toute décision prise par une administration, dont les organismes de sécurité sociale, à son avis, au mépris des dispositions de la loi du 1er décembre 1978 précitée ;

Attendu qu’en considérant la situation économique précaire, incertaine et peu stable de Monsieur G., il y a lieu de retenir que le comité-directeur a rejeté à bon droit la demande fondée sur l’ancien article 113 du Code de la sécurité sociale et ceci tant dans l’intérêt de l’Association d’assurance que de celui à plus long terme de Monsieur G. lui-même ;

Attendu qu’en considérant la situation financière difficile de Monsieur G. il est préférable de ne pas faire actuellement droit à la demande de l’assuré et ceci dans l’intérêt bien entendu de celui-ci, afin de lui garantir un revenu mensuel, laquelle rente viagère est en outre ajustée au niveau des salaires et adaptée au nombre indice du coût de la vie conformément aux dispositions légales applicables ;

 

Par ces motifs,

le Conseil arbitral, statuant contradictoirement et en premier ressort,

déclare le recours recevable mais non fondé et confirme la décision entreprise.

La lecture du présent jugement a été faite à l’audience publique du 9 mars 2015 en la salle d’audience du Conseil arbitral de la sécurité sociale à Luxembourg par Monsieur le président du siège Paul Capésius, en présence de Madame Véronique Szymanski, secrétaire.

Zum letzten Mal aktualisiert am