Arrêt
LE CONSEIL SUPERIEUR DES ASSURANCES SOCIALES:
Attendu qu'il est acquis en cause que le 15 juin 1977 K. quitta son domicile à B. vers 4 heures du matin pour se rendre en voiture à son lieu de travail auprès de la F.A.M. à Mersch; que sur son trajet normal, au lieu dit "Schwebacherbrücke", il s'assoupit un bref moment; que de ce fait, sa voiture se dirigeant vers le bord de la chaussée heurta les planches de sécurité aménagées sur le côté droit de la route; que par le choc qui en résulta K. subit une contusion à l'épaule droite;
Attendu que la commission des rentes de l'Association d'assurance contre les accidents, section industrielle, déclina par décision du 19 avril 1978 sa responsabilité relative au dit accident au motif que l'événement accidentel n'aurait pas pour origine une cause extérieure, violente et soudaine, inhérente au trajet à parcourir, mais une défaillance momentanée de l'organisme de l'assuré;
Vu le recours formé par K. contre cette décision;
Attendu que par jugement contradictoire du 14 septembre 1978, le Conseil arbitral des assurances sociales réforma la prédite décision de la commission des rentes et déclara indemnisable l'accident dont K. fut victime le 15 juin 1977 au titre d'accident de trajet;
Attendu que l'appel relevé par l'Association d'assurance contre les accidents, section industrielle, contre ce jugement le 9 novembre 1978 est recevable comme ayant été interjeté dans les forme et délai de la loi;
Attendu que l'Association d'assurance contre les accidents critique le jugement entrepris en ce qu'il a retenu l'accident survenu à son assuré K. comme accident de trajet engageant sa responsabilité alors qu'il serait nullement prouvé que la défaillance momentanée de l'assuré, lors de la conduite de sa voiture pour se rendre à son lieu de travail fût imputable à l'occupation professionnelle proprement dite;
Attendu que l'article 92, alinéa 2, du Code des assurances sociales énonce "qu'est considéré comme un fait de travail le parcours effectué pour se rendre au travail et en revenir, se rapportant à l'emploi assuré";
qu'il résulte de cette définition que l'accident de trajet est avant tout un accident de travail en ce sens qu'il doit répondre aux critères généraux de l'accident de travail dans la mesure où ses critères ne sont pas incompatibles avec sa nature spécifique;
Attendu qu'il s'en dégage également qu'un accident de trajet engage la responsabilité de l'Association d'assurance contre les accidents non seulement s'il est établi que l'accident est dû à un risque inhérent du chemin du travail mais aussi si l'accident est dû à un risque inhérent à l'assuré lui-même à condition que ce risque soit imputable à son occupation professionnelle.
Attendu que le conseil de K., Maître Bermes, soutient que la défaillance de son mandat s'explique par le fait qu'il était obligé à l'époque de fournir des heures de travail supplémentaires et surtout en raison de la circonstance que le jour de l'accident il était obligé de se lever 2 heures plus tôt que d'habitude, de sorte que c'est à la suite d'une fatigue prononcée due essentiellement aux conditions d'un travail anormalement prolongé qu'il s'est assoupi, provoquant de cette façon l'accident en question;
Attendu qu'il résulte des pièces versées en cause et non contestées par l'Association d'assurance contre les accidents que le 14 juin 1977, jour précédant celui où l'accident s'est produit, K. a travaillé pendant 11 heures et que notamment entre 16.15 et 18.45 heures il a fourni 2 1/2 heures de travail supplémentaires; qu'il n'est rentré à son domicile à B. que vers 20 heures, que le jour même de l'accident il a dû se lever déjà avant 4 heures du matin pour reprendre son travail, non pas comme d'habitude à 7 heures, mais déjà à 5 heures du matin;
que partant après une rude journée de travail, il n'était pas suffisamment reposé pour reprendre le lendemain son travail exceptionnellement tôt dans la matinée;
que dans ces circonstances force est d'admettre que la fatigue qui a provoqué la défaillance de K., génératrice de l'accident, est en relation directe et causale avec son emploi;
Attendu dès lors que l'accident s'étant produit à la suite d'une défaillance en relation directe avec l'emploi assuré, au cours d'un trajet normal et n'ayant pas été causé, même en partie, par une faute lourde de l'assuré, c'est à bon droit que le Conseil arbitral des assurances sociales a décidé que l'accident survenu le 15 juin 1977 à K. ouvre droit à indemnisation au titre d'accident de trajet et a renvoyé l'affaire devant la commission des rentes pour fixation des prestations;
Par ces motifs,
et ceux des premiers juges, le Conseil Supérieur des Assurances Sociales, statuant contradictoirement, Monsieur le rapporteur entendu en son rapport, reçoit l'appel en la forme, au fond le déclare non justifié, en conséquence confirme le jugement entrepris en toutes ses forme et teneur.
(Prés.: M. Coner; Pl. M. Nicolas et Me Bermes)