CSSS-11.02.2004

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Accident du travail
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Définitions  | Lésions immédiates  | Effort de soulèvement  | Présomption d'imputabilité  | Preuve (oui)  | Etat pathologique antérieur  | Relation causale  | Manifestation de l'état antérieur avant l'accident

Référence

  • CSSS-11.02.2004
  • No. du reg. : G 2003/0120
  • No.: 2004/0031
  • Aff. P. c/ AAI
  • U200218780

Base légale

  • Art0092-CSS

Sommaire

Il est constant en cause que l'hernie discale était apparue subitement au temps et au lieu de travail lorsque l'assuré avait soulevé la tête de polissage pour la fixer sur la machine à polir le marbre. Comme la lésion est apparue soudainement et qu'elle peut être localisée dans le temps et dans l'espace, elle est à qualifier d'accident par opposition à la maladie qui est caractérisée par son caractère progressif (cf. Jurisclasseur sécurité sociale, fasc. 310, n°145 et 155 relatif à des entorses, luxations, hernies déchirures musculaires à la suite d'efforts dans le travail, même si ces efforts ne sont que l'exécution normale du travail). La victime bénéficie partant d'une présomption d'imputabilité qui la dispense de rapporter la preuve du lien de causalité entre la lésion et l'activité professionnelle. (...).

A cet égard, il ne suffit pas à l'Association d'assurance contre les accidents d'établir que la lésion en cause s'explique du point de vue médical par un état pathologique antérieur dont souffrait la victime. En effet, pour qu'un accident ou une maladie soit prise en charge par l'assurance obligatoire contre les accidents, il faut que l'incident dommageable ait sa cause déterminante dans une occupation professionnelle assurée au Grand-Duché de Luxembourg. En l'espèce, la cause première et immédiate de l'hernie discale subie par la victime réside dans le fait qu'elle avait soulevé une charge d'un certain poids, en l'occurance d'une quarantaine de kg. En l'absence de cet effort de soulèvement, elle n'aurait pas subi d'hernie discale. Cette cause doit partant être considérée comme déterminante. La circonstance que l'hernie discale s'explique médicalement par quelque déficience préexistante de la colonne vertébrale de l'assuré reste sans incidence quant à la causalité telle que l'entend la loi. En effet, une relation causale déterminante au sens de la loi doit être admise entre la lésion et l'activité professionnelle même si le déclenchement de la lésion a été favorisée par quelque faiblesse constitutionnelle de l'assuré, à condition que l'état pathologique ne fût pas encore déclaré avec les symptômes caractéristiques avant l'activité professionnelle.

Or, il n'est pas établi qu'une affection vertébrale ait été médicalement constatée sur l'assuré avant l'incident du 4 juillet 2002. Celui-ci avait jusqu'à la date de la survenance de l'hernie discale accompli son travail habituel sans que l'usure ou l'état pathologique de ses vertèbres l'en eût empêché.

Il est de principe que le travailleur est protégé compte tenu de l'état de santé qui est le sien au moment de la survenue de la lésion. Des prédispositions innées ou acquises, qui ne se sont pas encore manifestées cliniquement sont comprises dans cette protection (cf. Jurisclasseur sécurité sociale, fasc. n°200-203; Ost-Mohr-Estelmann, Grundzüge des Sozialrechts, 2. Auflage, Verlag Vahlen 1998, S.189-191).

Corps

GRAND-DUCHE DU LUXEMBOURG

No. du reg.: G 2003/0120 No.: 2004/0031

CONSEIL SUPERlEUR DES ASSURANCES SOCIALES

Audience publique du onze février deux mille quatre

Composition:  
Mme Edmée Conzémius, 1er conseiller à la Cour d'appel, président
M. Marc Kerschen, conseiller à la Cour d'appel, assesseur-magistrat
M. Camille Hoffmann, conseiller à la Cour d'appel, assesseur-magistrat
M. Henri Goedert, docteur en droit, Luxembourg, assesseur-employeur
M. Marcel Kraus, ouvrier de l'Etat, Leudelange, assesseur-salarié
M. Francesco Spagnolo, secrétaire

ENTRE:

P., né le ..., demeurant à ...,

appelant,

comparant par Maître Laurent Lucas, avocat, demeurant à Luxembourg;

ET:

l'Association d'assurance contre les accidents, section industrielle, dont le siège est à Luxembourg, représentée par le président de son comité-directeur, Monsieur Paul Hansen, docteur en droit, demeurant à Luxembourg,

intimée,

comparant par Monsieur Romain Rech, inspecteur principal, demeurant à Dudelange.

Par requête déposée au secrétariat du Conseil supérieur des assurances sociales le 6 août 2003, P. a relevé appel d'un jugement rendu par le Conseil arbitral des assurances sociales le 17 juin 2003 dans la cause pendante entre lui et l'Association d'assurance contre les accidents, section industrielle, et dont le dispositif est conçu comme suit: Par ces motifs, le Conseil arbitral, statuant contradictoirement et en premier ressort, reçoit le recours en la forme; au fond en déboute.

Les parties furent convoquées pour l'audience publique du 28 janvier 2004, à laquelle le rapporteur désigné, Monsieur Camille Hoffmann, fit l'exposé de l'affaire.

Maître Laurent Lucas, pour l'appelant, conclut en ordre principal à la réformation du jugement du Conseil arbitral du 17 juin 2003 et en ordre subsidiaire à l'institution d'une expertise médicale.

Monsieur Romain Rech, pour l'intimée, conclut à la confirmation du jugement du Conseil arbitral du 17 juin 2003.

Après prise en délibéré de l'affaire le Conseil supérieur rendit à l'audience publique de ce jour, à laquelle le prononcé avait été fixé, l'arrêt qui suit:

L'assuré P. avait subi un accident en date du 4 juillet 2002 dans les ateliers de la s. à r. l. T. qui avait entraîné une hernie discale au niveau de la vertèbre L5. Suivant la déclaration d'accident du travail, l'assuré avait soulevé la tête de polissage pour la fixer sur la machine lorsqu'il a ressenti subitement une douleur dans son dos.

Suivant le compte rendu d'hospitalisation du 25 juillet 2002 établi par le Dr G. MATGE du Centre Hospitalier de Luxembourg, l'assuré avait souffert d'une lombosciatique gauche persistante dans les suites d'un effort de soulèvement en rapport avec une hernie discale nette L4-L5 gauche sur sténose canalaire congénitale.

Entérinant l'avis du médecin-conseil du Contrôle médical de la sécurité sociale, l'Association d'assurance contre les accidents, section industrielle, a, par décision présidentielle du 19 septembre 2002, maintenue par décision de la commission des rentes du 20 décembre 2002, refusé la prise en charge de l'accident au motif que les faits décrits dans la déclaration d'accident ne sont pas de nature à causer la lésion constatée qui a sa cause dans l'état pathologique antérieur de l'assuré. Le médecin-conseil du Contrôle médical de la sécurité sociale se réfère au rapport établi par le service de radiologie qui avait mis en évidence un « débord discal global en partie calcifié en parasagittal droit qui est probablement à mettre en rapport avec le discret spondylolisthésis prédécrit ».

Le recours formé par l'assuré devant le Conseil arbitral des assurances sociales a été déclaré non fondé par jugement du 17 juin 2003. Pour statuer ainsi le Conseil arbitral a suivi l'avis de son médecin-conseil qui estime que le fait litigieux a aggravé un état pathologique antérieur étant donné que le mécanisme physiopathologique tel que décrit par l'assuré n'est pas de nature à pouvoir produire une hernie discale sur un disque sain.

P. a relevé appel de ce jugement par requête déposée le 6 août 2003 au secrétariat du Conseil supérieur des assurances sociales, pour entendre, par réformation de la décision entreprise, principalement faire droit à la demande de prise en charge, et, subsidiairement, instituer une expertise médicale pour établir un lien causal entre le travail exécuté et l'accident et ses suites.

Il est constant en cause que l'hernie discale était apparue subitement au temps et au lieu de travail lorsque l'assuré avait soulevé la tête de polissage pour la fixer sur la machine à polir le marbre. Comme la lésion est apparue soudainement et qu'elle peut être localisée dans le temps et dans l'espace, elle est à qualifier d'accident par opposition à la maladie qui est caractérisée par son caractère progressif (cf. Jurisclasseur sécurité sociale, fasc. 310, n° 145 et 155 relatif à des entorses, luxations, hernies, déchirures musculaires à la suite d'efforts dans le travail, même si ces efforts ne sont que l'exécution normale du travail).

La victime bénéficie partant d'une présomtion d'imputabilité qui la dispense de rapporter la preuve du lien de causalité entre la lésion et l'activité professionnelle. Il appartient dès lors à l'Association d'assurance contre les accidents de rapporter la preuve contraire en démontrant par exemple que la lésion constatée au temps et au lieu de travail a été causée par un accident de droit commun, ou est due de façon déterminante à une affection antérieure.

A cet égard, il ne suffit pas à l'Association d'assurance contre les accidents d'établir que la lésion en cause s'explique du point de vue médical par un état pathologique antérieur dont souffrait la victime. En effet, pour qu'un accident ou une maladie soit prise en charge par l'assurance obligatoire contre les accidents, il faut que l'incident dommageable ait sa cause déterminante dans une occupation professionnelle assurée au Grand-Duché de Luxembourg. En l'espèce, la cause première et immédiate de l'hernie discale subie par la victime réside dans le fait qu'elle avait soulevé une charge d'un certain poids, en l'occurrence d'une quarantaine de kg. En l'absence de cet effort de soulèvement, elle n'aurait pas subi d'hernie discale. Cette cause doit partant être considérée comme déterminante. La circonstance que l'hernie discale s'explique médicalement par quelque déficience préexistante de la colonne vertébrale de l'assuré reste sans incidence quant à la causalité telle que l'entend la loi. En effet, une relation causale déterminante au sens de la loi doit être admise entre la lésion et l'activité professionnelle même si le déclenchement de la lésion a été favorisé par quelque faiblesse constitutionnelle de l'assuré, à condition que l'état pathologique ne se fût pas encore déclaré avec ses symptômes caractéristiques avant l'activité professionnelle. Or il n'est pas établi qu'une affection vertébrale ait été médicalement constatée sur l'assuré avant l'incident du 4 juillet 2002. Celui-ci avait jusqu'à la date de la survenance de l'hernie discale accompli son travail habituel sans que l'usure ou l'état pathologique de ses vertèbres l'en eût empêché.

Il est de principe que le travailleur est protégé compte tenu de l'état de santé qui est le sien au moment de la survenue de la lésion. Des prédispositions innées ou acquises, qui ne se sont pas encore manifestées cliniquement sont comprises dans cette protection (cf. Jurisclasseur sécurité sociale, fasc. no200-203; Ost-Mohr-Estelmann, Gründzüge des Sozialrechts, 2. Auflage, Verlag Vahlen 1998, S. 189-191).

L'appel est par conséquent à déclarer bien fondé.

Par ces motifs,

le Conseil supérieur des assurances sociales,

statuant contradictoirement, sur le rapport oral de l'assesseur-magistrat délégué,

déclare l'appel recevable,

le dit fondé,

REFORMANT:

dit que l'accident du travail subi par P. en date du 4 juillet 2002 doit être pris en charge par l'Association d'assurance contre les accidents, section industrielle, conformément aux articles 97 et suivants du code des assurances sociales,

renvoie la cause à la commission des rentes pour fixation des prestations.

La lecture du présent arrêt a été faite à l'audience publique du 11 février 2004 par Madame le Président Edmée Conzémius, en présence de Monsieur Francesco Spagnolo, secrétaire.

Le Président, Le Secrétaire,

signé: Conzémius signé: Spagnolo

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